Adapté au cinéma par Martin Scorsese, Silence, le roman éponyme de Shusaku Endo l’a aussi été quarante-cinq ans avant par Masahiro Shinoda. C’est cette version qui sort aujourd’hui au cinéma poru la première fois en France.
Silence, revient sur le conflit culturel provoqué par l’arrivée de missionnaires jésuites dans le Japon du XVIIe siècle
Synopsis :
Au XVIIe siècle, deux prêtres jésuites, le père Rodrigues et le père Garrpe, débarquent sur les côtes japonaises. Dans ce pays où la religion chrétienne est interdite et ses fidèles persécutés, les deux missionnaires sont accueillis avec enthousiasme par les croyants, obligés de se cacher pour pratiquer leur foi. Le but des deux Occidentaux est d’aider à réimplanter le christianisme dans le pays, mais également de découvrir la vérité sur leur mentor, le père Ferreira, mystérieusement disparu après sa capture par les autorités cinq ans plus tôt…
Adapté par Masahiro Shinoda figure clé de la Nouvelle Vague japonaise, il questionnait déjà la difficile compatibilité entre la nature
humaine et l’exigence de la foi. Avec la collaboration du grand directeur de la photographie Kazuo Miyagawa (Rashomon d’Akira Kurosawa, L’Intendant Sansho de Kenji Mizoguchi), Shinoda exprime à travers sa mise en scène tout le paradoxe de la spiritualité et enrobe de
mystère les magnifiques paysages nippons. Il filme son pays comme un territoire impénétrable, adoptant par là le point de vue d’un étranger – celui des jésuites.
Comme son titre le laisse entendre, Silence repose beaucoup sur sa bande-son, dans laquelle prédominent les bruits de la nature comme le chant des cigales ou le clapotis des vagues.
Influencé par l’œuvre de John Cage, le compositeur Toru Takemitsu joue également avec cette notion de silence, renvoyant à la fois au silence de Dieu face aux souffrances des hommes comme au silence des hommes perdus et démunis face à une nature omniprésente. Quant à la musique, elle entremêle instrumentation occidentale et orientale pour former une partition dissonante et discordante, soulignant la difficile confrontation entre les deux cultures.
Point d’orgue du film, ce conflit aboutira à un face-à-face magistral entre les pères Rodrigues et Ferreira, formidablement campés par l’Anglais David Lampson et le Japonais Tetsuro Tanba, dans une scène évoquant l’inoubliable apparition du colonel Kurtz, d’abord chez Joseph Conrad (Au cœur des ténèbres) puis chez Francis Ford Coppola (Apocalypse Now). Enfin visible en France, Silence est un voyage spirituel et physique au cœur de la foi, dont on sort difficilement indemne !