Critique : Three Husbands Fruit Chan

TIFF 2018

Réalisateur
Fruit Chan
Pays
Hong Kong
Notre score
3.3

Parfois il y a des bandes annonces qui nous vendent du rêve et parfois la déception est à la hauteur de l’attente d’y voir une perle du cinéma…

Three Husbands, du Cantonais Fruit Chan (3 Extremes : Nouvelle Cuisine) a bénéficié d’une hype que de mémoire de festivalier je n’avais pas vu depuis un moment. Une queue interminable pour cette session presse et invité qui présage d’une belle surprise tant le film semble être un OVNI dans cette morosité artistique que nous offre la 31ème édition du TIFF.

Défini comme film ‘’erotic drama’’, Three Husbands de Fruit Chan, nous raconte l’histoire de Mui une prostituée vivant sur un bateau de pêche ou plutôt une embarcation de fortune avec son père. Expliqué par le réalisateur comme étant une parodie du Hong Kong actuel, Three Husbands conclut sa trilogie sur la prostitution commencée en 2000 avec Durian Durian.

Interprétée par Chloe Maayan, Mui est sans contexte un rôle compliqué mais jouissif tant il oblige une implication totale que ce soit psychologique et physique. Et pourtant malgré la performance de l’actrice, Three Husbands est en partie une déception car cette parodie aurait dû éviter de tomber dans une vulgarité et un côté lourdingue pour parler de son sujet. Pendant de trop nombreux moments on assiste à des scènes où Mui pousse des cris pour simuler l’orgasme. Cette surexposition de la performance sexuelle pour atteindre l’orgasme est un parti voulu par le réalisateur mais il donne l’impression qu’il en fait trop comme si c’était pour assouvir certains phantasmes et satisfaire son public. Face à Chloe Maayan il y a un trio de 3 acteurs Four Eyes (Chan Charm-man) Big Brother (Mak Keung) et Second Brother (Chan Man-Lei). Tout ce petit monde est face à un curieux mystère : comment satisfaire l’appétit sexuelle de Mui, victime d’une déformation du clitoris qui la force à avoir des relations sexuelles quasi continuellement, tarifées ou non. Four Eyes, éperdument amoureux de Mui finit par convaincre son père et son oncle, de l’épouser croyant l’aider à sortir de cette spirale infernale qu’est la prostitution.

Autour de la thématique de la mer, du monde aquatique, le personnage de Mui ressemble par son physique atypique à la représentation de la Naissance de Vénus par Botticelli. Avec sa peau blanche couleur perle, ses formes généreuses, son penchant pour les poissons et son esprit ailleurs comme si les Dieux l’avaient touchée de leurs divines grâces, Mui devient peu à peu un personnage féérique. Parfois sirène, elle serait le fruit d’une légende de l’île de Lantau (proche de Hong Kong) et parfois sorcière (elle se fait chasser par les femmes de pêcheurs), Mui essaye de tout son possible de vivre sa vie de femme sans tabou car sous sa figure infantile, elle est étrangère au rapport du bien ou du mal.

Three Husbands a d’un point de vue scénaristique un sérieux défaut : il n’y a pas de conclusion à cette histoire. Ce film n’apporte pas grand chose, on ne sait pas ce que Fruit Chan essaye de nous dire, si ce n’est de laisser libre Mui à ses désirs. Il y a aussi quelques défauts de montage et de son parfois mais on y trouve d’excellentes idées comme ce passage en plein Hong Kong où dans un camion à benne à ordures traversant la ville, Mui et Four Eyes performent une relation sexuelle.

Face aux questions posées par la presse, Chan a voulu clarifier certains points : ‘’Évidemment ce film ne sera pas diffusé en Chine dû à son contenu équivoque. À Hong Kong très probablement mais pour adultes et rien ne sera censuré ou coupé.’’

Au final, ce film laisse un gout d’inachevé, un côté très inégal malgré Chloe Maayan, qui devrait obtenir une reconnaissance pour son rôle lors de ce festival. Présenté en compétition officielle Three Husbands n’a pourtant pas les garanties minimum pour faire de lui un favori à la victoire.

 

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3.3