Critique : Shokuzai Partie 1 – Celles qui voulaient se souvenir de Kiyoshi Kurosawa

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Après « Tokyo Sonata », Kiyoshi Kurosawa nous revient avec la saga « Shokuzai », adaptation du best-seller de Kanae Minato. Initialement présentée au Japon sous forme de série télévisée en cinq épisodes, Kurosawa en change la forme pour n’en faire plus que deux parties, dont la première nous est livrée cette semaine.

Dans la salle un silence de mort. Pas une toux, pas un fauteuil qui grince ne viennent perturber la projection. Le film s’ouvre sur l’histoire de la petite Emili et de ses amies, leur rencontre, et le jour où tout à basculé. On doit faire face au désespoir d’une mère, Asako Adachi (Kyôko Koizumi), et à ses mots très durs, jetés tels une malédiction: elles doivent se souvenir, ou elles devront faire pénitence toute leur vie. On n’échappe pas à l’ombre de cette mère en colère, qui plane sur le quotidien de ces filles. Même quinze ans après.

Ce premier volet suit l’histoire de Sae (Yû Aoi) et Maki (Eiko Koike), « Celles qui voulaient se souvenir ». La première , discrète et renfermée, se retrouvera prisonnière d’un mariage qui s’avèrera être bien loin du conte de fée. La seconde, devenue enseignante, est droite et plus dure. Au point que ses méthodes en deviendront peut être trop radicales. Les hommes n’auront pas le beau rôle, ici. Tour à tour pervers, lâches, ou encore violents, l’image du bourreau n’est pas loin. Mais chacune d’elles va tenter de faire pénitence, à sa manière. Et ça n’est plus vraiment le tueur de la petite Emili que ces jeunes femmes recherchent, mais une forme d’absolution auprès de sa mère.

Pour ma part, je n’ai ni lu le livre de Kanae Minato, ni eu la chance de voir le format série diffusé l’an passé.
En ce qui concerne le livre, je peux quand même dire que c’était un exercice périlleux pour Kurosawa que d’adapter un roman écrit par une femme, et dont l’objet principal est l’histoire de femmes. Et il le fait avec une grande justesse. Il n’est jamais lourd, notamment avec le personnage de la mère.
Elle aurait pu finir caricaturée, mais il amène de façon très subtile je trouve une forme d’empathie envers elle. Car, évidemment, on est à même de comprendre que la perte d’un enfant provoque une douleur immense. Mais on finit par se rallier à son combat pour la mémoire, recherchant nous aussi un moyen de se racheter auprès d’elle. Rien n’est manichéen, il n’y a pas que remords pour les filles et désir de vengeance pour la mère. Une relation quasi affective s’instaure entre toutes ces femmes. »Shokuzai’ signifie « pénitence », et la force que mettent ces deux jeunes femmes à tenir leur promesse faite à Asako, jusqu’au sacrifice, a eu pour effet de rendre mes yeux quelque peu humides, je l’avoue.
Grande maitrise de la part de Kurosawa. Tout en tenant parfaitement cette histoire, presque occulte parfois et pleine de sentiments complexes, il prend aussi le temps de nous dépeindre la société japonaise, et la place des femmes au sein de celle-ci, sans aucun fard.

Mais des questions subsistent. Qui est le tueur d’Emili? Qu’en est-il de ses deux autre camarades, Akiko et Yuka, aujourd’hui?

Autant de réponse que l’on attend dans la deuxième partie qui sort aujourd’hui !