Critique : Lucky Strike de Kim Yong-hoon

© 2020 MegaboxJoongAng PLUS M & B.A. ENTERTAINMENT CORPORATION
Date de sortie
08/07/2020
Réalisateur
Kim Yong-hoon
Distribution
Wild Bunch
Notre score
3

Film attendu grâce à un casting solide, le premier long métrage de Kim Yong-hoon se nomme Lucky Strike et profite d’une sortie dans nos contrées. Film choral aux tendances de polar, il met en scène une multitude de personnages aux destins liés par un mystérieux sac plein d’argent dans un film adapté d’un roman de Keisuke Sone, où ses personnages sombrent peu à peu dans la criminalité par avidité. Il sortira en salles dès demain, 8 juillet 2020.

Synopsis :
« Un corps retrouvé sur une plage, un employé de sauna, un douanier peu scrupuleux, un prêteur sur gage et une hôtesse de bar qui n’auraient jamais dû se croiser. Mais le sort en a décidé autrement en plaçant sur leur route un sac rempli de billets, qui bouleversera leur destin Arnaques, trahisons et meurtres : tous les coups sont permis pour qui rêve de nouveaux départs… » (Wild Bunch)

Que feriez-vous si vous tombiez par hasard sur un sac plein de billets ? La perspective de s’échapper et de changer de vie séduit évidemment : l’aventure, le désir de renouveau, tant de bonnes raisons de faire un tel choix. Et c’est ce qui arrive à plusieurs personnages lorsqu’ils sont confrontés à ce sac, se demandant bien ce qui pourrait changer dans leurs vies s’ils profitaient de l’opportunité. Loin d’être des enfants de chœur, ils n’en restent pas moins tiraillés entre le crime et la raison, avec en point d’orgue un meurtre qui semble relié à tout cela. Pour la plupart inconnus les uns des autres, leurs destins se croisent dans un film choral à la chronologie particulièrement confuse malgré une structure composée de chapitres. Si on comprend bien les intentions du réalisateur, on doit avouer avoir été parfois perdus par certaines scènes. Pour autant, il s’en sort avec les honneurs grâce à quelques scènes géniales où il fait preuve d’inventivité, tant dans la mise en scène de ses personnages que les situations qu’il raconte dans un récit teinté d’humour cynique qui joue avec les limites d’une humanité qui sombre par avidité.

Si ses personnages n’ont pas grand chose d’original, reposant des idées éculées à la limite de la caricature, le réalisateur peut toutefois compter sur son formidable casting : l’inévitable Jung Woo-sung (Steel Rain, Le Bon, La Brute et le Cinglé) évidemment, dans un rôle de douanier pathétique, mais aussi et surtout Jeon Do-yeon (The Housemaid, A Man and a Woman), absolument formidable dans un rôle de femme fatale qui n’est pas sans rappeler sa prestation dans le plus sérieux The Shameless il y a quelques années. Attention toutefois : si elle est introduite de la sorte, elle déconstruit rapidement cette image de femme fatale pour révéler en réalité une personnalité à mille lieux du rôle de « séductrice » auquel on réduit trop souvent les femmes dans les polars. Enfin, cette galerie de personnages immoraux est complétée par des valeurs sûres du cinéma coréen comme Bae Sung-woo (The Great Battle), Youn Yuh-jung (L’ivresse de l’argent) ou encore Jeong Man-sik (Battleship Island) qui apportent tous et toutes leur savoir-faire dans des rôles que l’on a pourtant déjà vu mille fois dans des polars coréens.

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C’est d’ailleurs là le plus gros problème de Lucky Strike : il y a indubitablement quelque chose de satisfaisant à voir ce petit monde s’entrechoquer dans un film choral au rythme soutenu, où les coups bas s’enchaînent dans des relations qui ont depuis bien longtemps abandonnées toute forme de morale. Mais le film tombe à bout de souffle dès lors qu’il tente de dépasser cela, n’apportant pas grand chose de plus au cinéma auquel il appartient. On peut lui accorder une photographie intéressante que l’on doit au chef opérateur Kim Tae-sung (à l’oeuvre sur Hard Day et Tunnel), offrant à chaque personnage une ambiance aux couleurs différentes, comme un moyen de marquer les caractères de personnages qui ne trempent pas habituellement dans le crime, mais qui y arrivent peu à peu avec leurs propres univers et convictions.

Lucky Strike est probablement moins étincelant qu’espéré, mais le polar de Kim Yong-hoon utilise les codes du genre avec suffisamment d’habileté pour que l’on se laisse emporter par sa manière de raconter des personnages dont les destins croisés révèlent leur nature profondément pathétique. On apprécie sa manière de déconstruire le cliché de la femme fatale mais on reste dubitatifs face à une narration confuse qui laisse assez peu de place pour souffler et faire vivre ses meilleurs moments, pourtant le film a tout pour plaire grâce à son excellent casting et sa photographie qui, sans réinventer la roue, lui offre une belle identité.

Lucky Strike
3