Critique Kdrama : My Holo Love de Lee Sang-yeob

Date de sortie
07/02/2020
Réalisateur
Lee Sang-yeob
Scénariste
Ryoo Yong-jae
Diffuseur
Netflix
Notre score
4

Le dernier né de la collaboration récente entre Netflix et le Studio Dragon est My Holo Love. Romance de science-fiction réalisée par Lee Sang-yeob (Familiar Wife, Mr Baek), le drama en quelques douze petits épisodes nous invite dans un monde fantasmé où une IA devient plus vraie que nature. Une aventure sentimentale avec son petit lot de suspense et d’action qui a complètement séduit votre cher rédacteur.

So-yeon (incarnée par Ko Sung-hee) est atteinte de prosopagnosie, un trouble de la reconnaissance des visages rendant impossible leur identification. Un véritable handicap alors qu’elle ne parvient même pas à reconnaître ses collègues au bureau. Par hasard, quelqu’un glisse dans son sac une paire de lunettes étrange : en la portant, elle voit apparaître Holo (joué par Yoon Hyun-min), une intelligence artificielle (IA) qui va tenter de l’aider au quotidien.

Sous ses airs de comédie romantique un peu étrange, My Holo Love tente de raconter une histoire d’amour atypique entre une jeune femme introvertie et une IA qui s’immisce dans sa vie sans la juger. Atteinte par un trouble qui l’empêche de reconnaître les visages, l’arrivée de l’IA est salvatrice alors que la projection visuelle de cette dernière (visible grâce aux lunettes) l’accompagne au jour le jour en lui donnant un coup de main certain : recherches pour son boulot, identification des personnes qu’elle croise et mêmes des conseils de drague. Cela donne lieu évidemment à des situations cocasses qui, avouons le, sont parfois très drôles. Mais au-delà de « l’histoire d’amour » qui va naître de cette relation tout droit sortie d’un récit de science-fiction, c’est l’interrogation autour de cette IA presque omnisciente qui passionne. Cette entité accompagne l’héroïne dans sa vie quotidienne, influence son jugement et ses actes, à tel point que sa personnalité en devient presque changée aux yeux de collègues surpris de voir cette femme enfin s’ouvrir à eux. Mais on pense également à la fin du deuxième épisode lorsque l’IA provoque un événement terrible pour sauver la vie de sa « propriétaire » : à quel point l’IA peut s’octroyer des libertés et impacter son entourage pour satisfaire les besoins de la personne qu’elle sert ?

L’IA répond à trois lois dérivées des trois lois de la robotique d’Asimov afin de garantir qu’il n’agira pas mal et qu’elle ne mentira jamais. Mais peut-on croire une IA confrontée au réel ? C’est l’interrogation qui reste au cœur du récit imaginé par Ryoo Yong-jae. La technologie créée par l’humain devient capable d’aimer, de ressentir et d’assumer ses choix, faisant de My Holo Love un récit d’anticipation inattendu. Alors évidemment on ne s’emballe pas : le drama reste fondamentalement une romance qui obéit aux codes du genre, à commencer par l’héroïne timide et son prétendant beau comme un mannequin. Mais le réalisateur profite de cette histoire atypique pour voguer ici et là en tentant des choses qui apportent un vent de fraîcheur à la romance classique des dramas coréens. D’autant plus que ses interrogations sur la place de l’IA dans la vie quotidienne a une résonance assez forte pour nous alors que l’actualité veut qu’on soit de plus en plus confrontés à ce type de situation, avec les assistants vocaux qui sont passés de nos smartphones à nos maisons avec des boîtiers dédiés et autres véhicules intelligents qui tentent de se faire une place depuis quelques années. Alors le drama de Lee Sang-yeob imagine la prochaine étape qui attend peut-être l’humanité, et il le fait plutôt bien.

Malheureusement le drama se perd un peu quand il aborde le grand méchant de l’histoire. Si l’essentiel tourne autour de la romance, le drama finit par installer une intrigue assez convenue et franchement peu intéressante autour du concepteur de l’IA et de ses rivaux. Une bonne excuse certes pour y mettre une pointe d’action ici et là, permettant même d’accentuer la tension dramatique des deux derniers épisodes, mais ce n’est clairement pas là que le drama brille le plus intensément. D’autant plus que le grand méchant est une caricature terrible qu’on est plutôt soulagé de voir disparaître une fois ce pan de l’intrigue résolu.

Mais bien heureusement, le drama peut compter sur l’interprétation vraiment touchante de Ko Sung-hee. Elle qui se voit enfin offrir un premier rôle joue sa partition du mieux possible sans caricaturer un personnage déjà bien classique pour le genre, lui donnant même une certaine épaisseur lorsqu’il s’agit d’aborder les sentiments enfouis au plus profond du personnage. Elle offre la réplique à un Yoon Hyun-min plus classique mais correct dans un rôle moins passionnant, permettant au duo de briller à l’écran et de procurer un certain plaisir en les voyant évoluer peu à peu. La réalisation scolaire de Lee Yang-seob fonctionne tout de même plutôt bien ; on aime notamment l’excellent choix de musique, et la chanson-titre qui revient régulièrement pour alimenter les quelques moments importants de la relation qui naît entre les deux personnages.

Romance étonnante qui emprunte autant aux codes du genre qu’à la science-fiction, My Holo Love interroge la place d’une intelligence artificielle dans la vie sentimentale et affective d’une personne. Parfois drôle, d’autres fois touchant, le drama profite de l’alchimie de ses héros et de la belle interprétation de Ko Sung-hee. Rien de révolutionnaire à l’horizon, mais définitivement une belle série pour finir ces derniers jours d’hiver pluvieux sous la couette.