Critique : Ring 2 de Hideo Nakata

Une semaine après la vague de meurtres mettant en cause une mystérieuse cassette maudite, la police japonaise enquête sur la mort du professeur Takayama et la disparition de son ex-femme Asakawa. Fait étrange, l’autopsie du corps de Sadako, qui a été retrouvé au fond d’un puits, révèle qu’elle serait restée emmurée vivante pendant plus de trente ans. Tanako, l’assistante de Takayama, décide de mener sa propre investigation en compagnie d’Ikuma, l’assistant d’Asakawa. Ils ne tarderont pas à découvrir la véritable origine de la malédiction…

Tout juste un an après Ring, Hideo Nakata remet le couvert avec un second opus se présentant comme la suite directe du premier (les évènements ont lieu exactement une semaine après ceux de Ring). Cette proximité étonnante entre les deux films pourrait bien malgré elle révéler un certain désir de la part du réalisateur de tirer profit au maximum de l’engouement commercial que Ring a suscité lors de sa sortie… Mais qu’en est-il vraiment ? Suite purement commerciale ou véritable œuvre d’auteur ? Hélas, de nombreux évènements viennent corroborer la triste hypothèse d’une suite commerciale…

Et c’est fort dommage, car Ring 2 commençait pourtant bien : adoptant le style du thriller ou du film policier, toute la première partie se concentre sur l’enquête menée par Tanako pour lever le voile sur le meurtre de l’homme qu’elle aimait, le professeur Takayama. De regroupement d’indices en recoupement de faits, l’investigation est en elle-même très bien menée, même si le comportement de certains personnages demeure étrange et parfois même invraisemblable (le policier qui vient chez Tanako et prend plaisir à l’effrayer pour on ne sait quelle raison). De plus, le fait que Ring 2 se déroule exactement une semaine après Ring (la mort du père d’Asakawa, à qui elle avait décidé à la fin du premier opus de montrer la cassette pour sauver son fils Yoichi, permet de donner un repère temporel à l’histoire) est également très réjouissant : le spectateur, qui retrouve les mêmes personnages que dans le film précédent, se sent en terrain connu et de fait adhère plus facilement à cette nouvelle intrigue. Ce choix de conserver les mêmes acteurs pour produire une suite crédible aurait pu nous conforter dans l’idée qu’il s’agissait bien là d’un véritable film d’auteur, si cette attention particulière de la part du réalisateur avait été poussée tout au long du film…


Car malheureusement, à partir de la seconde moitié de Ring 2, l’histoire se détériore franchement. Le manque d’explications qui faisait déjà défaut au premier Ring est ici poussé à son paroxysme et finit même par agacer les plus indulgents. Des scènes fantasmatiques très abstraites (la séquence de l’expérience dans l’eau) viennent totalement détruire la logique rigoureuse de l’enquête policière de la première partie.  Le spectateur, même s’il s’accroche, finit par se perdre dans les méandres de cet univers dénué de sens et ressent la très désagréable impression qu’on se pait royalement sa tête. Les personnages sont  toujours aussi vides (voire plus) et  surjoués, et certains évènements arrivent au coeur de l’intrigue comme un cheveu sur la soupe (pourquoi Yoichi est-il tout à coup doté de pouvoirs maléfiques ? Pourquoi certaines victimes de la malédiction hantent-ils leur entourage à la manière de Sadako ?). En outre, Ring 2 avait pour ambition principale d’apporter quelques révélations sur les origines de Sadako mais, au final, on n’en sait pas beaucoup plus, tant le mystère est excessivement cultivé tout au long du film.

Si l’on compare Ring 2 au premier du même nom, on se rend vite compte que malgré ses bonnes intentions, le film a été bâclé (comment aurait-il pu en être autrement avec seulement un an d’intervalle entre les deux ?). La recherche esthétique qui caractérisait Ring est dans cette suite quasi-nulle ; le film a en effet été réalisé de la manière la plus conventionnelle qui soit. De même, l’ambiance terriblement oppressante du premier a été sacrifiée au profit de l’enquête policière qui produit une ambiance beaucoup plus terre-à-terre, presque systématique, sans susciter aucune sensation de menace ou de mort imminente. Le mythe de la cassette tombe carrément à l’eau et la malédiction de Sadako n’a plus rien de terrifiant, ce qui est tout de même fort dommage pour un film à vocation horrifique. La course contre la montre qui tenait le spectateur en haleine du début à la fin de Ring a également été complètement mise de côté, supplantée par un rythme mou pendant lequel on a l’impression qu’il ne se passe strictement rien.

Restent quelques très rares scènes effrayantes (une en fait, l’apparition de Shizuko et Sadako dans la maison familiale des Yamamura) qui se singularisent grâce à une mise en scène particulièrement subtile et efficace et qui nous procure un véritable sentiment d’angoisse fort agréable (ben oui, on commençait à s’endormir, nous…) au beau milieu de cette kyrielle d’évènements dénués de sens logique et d’intérêt. Mais, si elles parviennent à rehausser un peu le film, ces scènes d’horreur pure ne parviennent néanmoins pas à le sauver complètement.


Bref, au vu de tous ces éléments qui jouent en défaveur du film, il semble bien que Ring 2 ait été produit dans l’unique but de surfer sur la vague de succès engendré par le premier opus. Hideo Nakata a tout de même tenu à faire ça bien, d’où sa volonté de produire une suite directe qui tient à peu près la route, mais il n’a apparemment pas su ou pu appliquer ce concept jusqu’à la fin (problème de délais à respecter ?). Ring 2 est donc un film complètement déséquilibré et très inégal dans sa conception, fait à la va-vite et dont le seul intérêt réside en l’éventuelle possibilité de comparaison entre les deux opus. A voir juste si l’on est fan de Ring… Pour les autres, vous pouvez dédaigner cette séquelle opportuniste sans remords.