Critique : The Blade de Tsui Hark

The Blade, échec commercial sorti en 1995, fait de l’Acier, la première des Vérités. Chiu Man Cheuk interprète On, dans la réalité et dans le songe d’une jeune fille caressant les rayons du soleil.

Un sang impur vient tout souiller. Tsui Hark va au plus loin dans l’abjection. Il met en parallèle le choc des marteaux et le battement des cœurs qui n’auront de cesse de s’emballer. Dans un hurlement ponctuant l’agonie, Tsui Hark filme la matière, passe du corps à l’inorganique, s’aligne sans le vouloir sur des préoccupations à la David Cronenberg.

Une jouvencelle vient s’introduire dans un monde de mâles. L’Asie dépeinte est bestiale et sublime, les couleurs d’une mythologie submergent le cadre de Hark le vietnamien. On pense à la rugosité de La Dernière Tentation du Christ de Martin Scorsese, agissant comme une influence assumée.

Un premier assaut est transcendé par la photographie de Kwok-Man Keung. La caméra se doit d’être partout, au plus près du spectacle de la rue, dans l’épaisseur des corps qui s’affrontent et qui s’étreignent. The Blade a pour décor un apocalypse moyenâgeux, où des putes évanescentes viennent offrir un peu d’oubli à des combattants épuisés. La lutte est pour demain, on cherche à se venger.

Lors d’une punition collective, Tsui Hark crée de l’ambiguïté, à la manière du maître Chang Cheh, autre adepte d’authentique virilité chevaleresque. Des tambours résonnent au loin, la discipline crée de la sagesse, mais n’accorde aucune place pour l’amour. Une mutilation décuple les ressources martiales de On le colérique, puisant tout son savoir dans un manuel boueux retrouvé après les assauts. Les combats sont spectaculaires et éclairées par les flammes de l’Enfer. Elles seules permettent de distinguer les corps meurtris.

Le Conan de John Milius n’est pas loin, même si les synthés de Raymond Wong n’égalent pas la poésie du regretté Basil Poledouris, le barbarisme reste crédible. Toutes les intentions de Tsui Hark sont pures car la violence appelle le chaos. Ding On est un exclus, la colère va le pousser à errer et à se retrouver. En apothéose, face à Fei Lung l’assassin de son père, interprété par Xin Xin Xiong, la Lame devient sa Vérité. Le Temps est prêt à tout effacer. Les hommes sont pris dans des pièges à loup.