Critique: Highlander The Search For Vengeance de Yoshiaki Kawajiri

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3.5

Il y aura toujours des gens pour vous dire que Highlander (l’original, 1986, Russell Mulcahy) est un film de merde. Des tas de gens n’aiment pas Christophe Lambert ou Queen, trouvent l’esthétique du film trop kitsch ou trop eighties, et tout le monde n’est pas convaincu par les histoires d’immortalité. C’est vrai, on peut trouver que la franchise Highlander tout entière est bidon, mais c’est impossible de renier son statut culte. Trois séries, des jeux vidéos, de suites toutes plus mauvaises les unes que les autres, peut-être même des BD et des bouquins et… un film d’animation, qui se pose là. Même s’ils ne s’intéressent pas à l’animation, les fans d’Highlander l’ont vu et, même s’ils ne sont pas fans d’Highlander, les aficionados d’animation japonaise l’ont vu aussi, parce que c’est le dernier film en date de Yoshiaki Kawajiri (3 longues années déjà qu’il n’a rien pondu…).

Pour ceux qui connaissent un peu les deux, The Search For Vengeance est forcément une source de curiosité. Comme c’est Highlander, on s’attend à avoir des flashbacks et de la décapitation, et comme c’est Kawajiri, on s’attend à avoir du sang et du cul. Pas forcément un mélange désagréable, finalement, et le résultat, bien qu’il corresponde dans l’ensemble à ce à quoi on pouvait s’attendre, nous réserve néanmoins quelques jolies surprises, en bien ou en mal. Kawajiri et les scénaristes (occidentaux) ont en effet pris d’énormes libertés avec le film originel, ce qui n’était pas forcément une mauvaise chose, vu que les trop nombreuses suites tournent rapidement en rond, faute de réinventer le concept. Ils ont foutu à la poubelle tout ce qui les encombrait, ont gardé ce qu’ils trouvaient cool (principalement les combats à l’épée et la décapitation) et ont fait leur truc, en changeant le nom du personnage principal pour ne pas avoir à justifier leurs entorses à la continuité. Exit Connor ou Duncan McLeod, place à Colin.

Là où les autres highlanders qui nous avaient été présentés étaient des personnages relativement sages et intelligents, qui avaient mis leur immortalité à profit pour développer une grande richesse intérieure tout en devenant des combattants hors-pairs, Colin McLeod, bien qu’il soit plus vieux de plusieurs centaines d’années, n’est guère plus qu’une bête sauvage, une brute féroce et sans nuances, qui cherche depuis 2000 ans à assouvir une soif de vengeance qui a depuis longtemps perdu son sens. Le seul sentiment qui l’anime est la haine, un sentiment vain et égoïste qui a presque totalement annihilé l’amour qui est censé en être la source. Autant dire que, dans toute la première partie du film, et avant qu’on en sache plus sur lui, on trouve le personnage principal assez peu intéressant. On ne s’identifie pas, et on éprouve difficilement de la sympathie pour lui. Puis le film progresse et la manière dont il est présenté évolue également et, chose rarissime chez Kawajiri, qui aime les hommes forts et virils sur lesquels on peut prendre exemple, on se rend compte que ce « héros » est en fait plus pitoyable qu’autre chose, vu que ça fait 2000 ans qu’il se fait régulièrement botter le cul par le meurtrier de sa femme, qui est tout simplement trop fort pour lui. Le film commence dans notre futur quand, tel un jokari masochiste, il revient une fois de plus vers celui qui lui foutra probablement une fois de plus sa raclée.

Ajouter de la SF au thème de l’immortalité avait déjà été tenté dans la franchise, sur Highlander II, et le film est unanimement reconnu comme une des pires choses que Highlander ait à offrir. Kawajiri et les scénaristes de The Search For Vengeance ont pourtant fait le choix de retenter le coup, et, cette fois-ci, le pari est gagné. Haut la main, même. Les décors représentant un New-York post-apocalyptique en ville fantôme sont d’une classe indescriptible, les méchas ne paraissent même pas déplacés, et l’intrigue souligne avec justesse que la mégalomanie est indifférente aux époques. Comme dans tout Highlander qui se respecte, la narration alterne constamment entre présent (enfin, futur) et flashbacks des vies passées du protagoniste, mais ces séquences n’avaient pas été aussi bien amenées et intégrées à la cohérence de la progression de l’histoire depuis longtemps.

Evidemment, on pourra reprocher à The Search For Vengeance son scénar, très léger par moments, et qui aurait gagné à être plus travaillé : la fin pue le gros manque d’inspiration, on aurait espéré que certains personnages secondaires soient plus développés, et l’intrigue pseudo-scientifique en forme d’anticipation bas de gamme à des allures de prétexte mal camouflé. Le personnage du druide fantôme, qui sort complètement de nulle part, est d’ailleurs un moyen bien pratique pour les scénaristes d’expliquer sans trop se fouler tout ce qui était trop compliqué à expliquer autrement. On pourra aussi reprocher à Colin MacLeod de ne pas être un type très subtil, et aux réflexions sur l’immortalité, l’amour et la vengeance de manquer de profondeur, mais, pour peu qu’on sache être bon public quand un film le mérite, on sera plutôt tenté de reconnaître que The Search for Vengeance est visuellement très bien foutu, qu’il est bourré de bonnes idées et de bonnes intentions, et que Kawajiri mène bien sa barque. Il nous donne de l’action, une atmosphère, un peu d’originalité, et au final, parvient à faire de ses défauts des éléments indispensables de son charme.