Masterclass avec Kim Jee-woon: Programme Spécial Courts Métrage

En dépit d’un concert événement des Super Junior à Londres, une audience curieuse s’est déplacée pour visionner quatre courts métrages réalisés par Kim Jee-woon. Le réalisateur de I Saw the Devil est en effet, avec Bong Joon-ho et les frères Park, l’un de ceux qui continuent à alterner courts et longs métrages. Dans le cadre de cette projection spéciale – dans le cadre du festival du film coréen de Londres -, il a ainsi été possible de voir le réalisateur à l’œuvre dans divers genres : comédie horreur avec Coming Out (2000), action espionnage avec Present (2009), science-fiction avec Doomsday Book (2012) et comédie romantique avec One Perfect Day (2013). Kim a d’ailleurs fait remarquer que ce dernier genre est celui ou il a le moins d’expérience mais espère pouvoir en gagner. Avec humour, il s’est aussi permis d’ajouter que l’audience se verra transportée dans un autre univers « pile au moment ou l’ennui la gagnerait ».

Concert des Super Junior a Londres
Concert des Super Junior a Londres

Apres la projection, Kim Jee-woon est monte sur scène avec une traductrice et le critique Tony Rayns. Pour commencer en humour, il a été interroge sur l’origine saugrenue du pierre-papier-ciseaux dans le cadre d’un premier rendez vous amoureux, notamment si lui-même utilisait cette technique quelque peu ringarde. « Je n’ai plus vraiment l’occasion d’avoir de rendez-vous » a-t-il répondu (surprenant n’est-ce pas connaissant son style plutôt cool !). A quoi a-t-il ajoute que c’est plus la génération dix ans plus âgée qui l’utilisait… et que désormais ce jeu existe encore uniquement entre collègues au moment d’acheter le déjeuner ou de faire la vaisselle. Et vous ? A quelle occasion l’utilisez-vous ?

One Perfect Day (2013)
One Perfect Day (2013)

Le choix de donner un format court ou long à un film dépend de plusieurs critères pour Kim Jee-woon. Tout d’abord est-ce que le sujet est adapté pour un long métrage, notamment d’un point de vue politique. Ensuite, si le sujet l’intéresse, il lui faut que l’opportunité se présente et qu’il ait le temps d’y travailler. Faire des courts avec son propre argent ne le dérange, mais le plus souvent il est commissionne et profite de l’occasion. Enfin, il ne supporte pas d’attendre le feu vert pour la production d’un long-métrage et de déjeuner seul dans cette attente, et préfère donc être sur le plateau et manger avec l’équipe de tournage.

Un autre point intéressant ensuite abordé est que pour lui la production de courts métrages, d’habitude un domaine réservé aux apprentis réalisateurs avec une structure de production moins élaborée,  est plus favorable avec la possibilité de jouer sur sa reconnaissance auprès du public pour avoir la participation de techniciens et acteurs reconnus.

Plus particulièrement en relation avec Doomsday Book, un membre du public a surpris le réalisateur en faisant remarquer que la version projetée ce soir même était différente que lors du festival du film de Londres un an auparavant. Plus précisément, la version du FFL se poursuivait avec le technicien emportant le robot chez lui pour le réanimer avec une de ses puces de rechange, au lieu de le laisser sur son autodestruction (pour en savoir plus, il faut visionner le film). Kim précisa alors que la dernière version était plus sombre, plus en accord avec sa propre vision négative du monde. Il ne souhaite pas aux autres d’être aussi pessimiste que lui.

En référence a des personnages du passe (Coming Out) ou du futur (Doomsday Book), avec lesquels il est facile de s’identifier, il lui a été demande quels sont les aspects qu’il travaille en priorité au moment de mettre un script en scène. A quoi il a répondu que l’espace, le contexte dans lequel les personnages évoluent est le plus important. Par exemple, la crise financière des années 1990 en Corée du Sud dans The Quiet Family. Ensuite, au moment de penser les personnages eux-mêmes, il s’inspire de personnes qui  ont véritablement rencontrée dans son quotidien. A cet effet, il apprécie plus particulièrement l’expressivité des visages et la possibilité de retranscrire diverses réactions qu’il trouve intéressantes dans ses films. Au delà du thème du film, il se pose donc la question de quel type de personnages il veut introduire.

Comme remarqué par un membre du public, Kim a un style très visuel. De ce point de vue, il a noté que, de par la pratique de l’industrie audiovisuelle sud-coréenne, il avait pris l’habitude de story-boarder l’essentiel de ses films, de sorte a laisser une marge de 10-20% pour les quelques improvisations et ajouts nécessaires, en toute confiance. Il explique d’ailleurs comment les américains l’ont pris pour un fou quand ils l’ont vu débarquer avec son story-board volumineux pour The Last Stand (peut-être pas si fou que ca car il va enchainer avec un nouveau long-métrage a Hollywood, intitule Coward, inspiré de bandes dessinées). Il a ajouté cependant qu’avec l’apport de la direction artistique et de l’éclairage, beaucoup du travail de mise en scène se fait sur le tournage, et qu’il ne peut pas s’attacher exclusivement a son story-board. Avec I Saw the Devil, il avait mis beaucoup mis l’accent sur le style visuel, mais il a aussi appris depuis a mieux travailler sur l’ensemble des éléments qui composent la scène.

Kim Jee-woon repond aux questions du public
Kim Jee-woon repond aux questions du public

Interrogé sur son apport dans I Saw the Devil au niveau de la mise en scène, dont entre autre la scène de cannibalisme, celui-ci a précisé qu’il travaillait a partir d’un scenario d’un autre qu’il a rendu plus cruel, se détachant du modèle traditionnel de la course-poursuite se terminant par la mort du criminel et une vengeance simpliste. Il a voulu au contraire ajouter la souffrance infligée en retour au criminel par la victime. Il ne croit pas en une vengeance réussite. La meilleure des vengeances serait d’être plus heureux que le criminel. Mais, quand le mal a été fait, il est difficile de devenir plus heureux, cela n’a aucun sens. C’est pourquoi il voulait même l’accent sur la honte et la douleur de la victime dans un dernier plan rapproche.

Dans Coming Out et A Tale of 2 Sisters, Kim Jee-woon semble s’appuyer sur des minorités pour caractériser ses personnages principaux; la “vampire” dans Coming Out, les malades mentaux dans A Tale of 2 Sisters. Il rétorque que pour trouver des obstacles intérieurs et extérieurs aux personnages, s’appuyer sur des minorités est le plus évident. Cela garantie une certaine dose d’émotions. Au moment du tournage de Coming Out, de nombreuses minorités sortaient de l’ombre, recevant le support d’une partie de la société, et le rejet de l’opposition. C’était une période assez confuse. Via son approche sociale et humoristique, mon film me permettait d’affirmer ma croyance que des individus différents devraient coexister en toute paix.

A l’occasion d’un autre aparté, cette fois à propos de A Bittersweet Life, on lui demande le sens de la scène finale ou l’on voit Kim Seon-woo (Lee Byung-hun) boxer avec son reflet dans le miroir suite a sa mort. En quelques mots il résume que cette scène vise à montrer que Seon-woo est la propre cause de sa déperdition et pas les autres, que sa chute vient de lui-même et que sa vengeance est vaine.

Pour finir la soirée, Kim a introduit 2 Blu-Rays inédits de A Tale of 2 Sisters (jamais montres auparavant !) et 3 biographies de lui-même (faisant remarquer avec dérision et humour que n’aillant pas un esprit complique, celles-ci sont relativement fine, pouvant être finie en une heure !) a distribuer au public. L’un des blu-ray est revenu à celui du public ayant pose la première question. Puis pour le rester, il a accepte le jeu du public à distribuer les autres lots coup de « pierre-papier-ciseaux », plutôt bien en contexte après la projection de One Perfect Day.

Kim Jee-woon joue au Pierre-Papier-Ciseaux
Kim Jee-woon joue au Pierre-Papier-Ciseaux

 

Remerciements au Centre Culture Coréen du Royaume-Uni pour l’organisation du festival et notamment de la projection spéciale courts métrages et la session de questions réponses avec Kim Jee-woon.

 

Credits Photos: Nokia SmartCam, Lumia 925 (c)