Critique: Killer Toon de Lee Yong-gyun

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A l’occasion d’Halloween, nous avons choisi de rédiger la critique du « film d’horreur coréen de l’année », c’est a dire Killer Toon.

Depuis quelques années, les bandes dessinées coréennes – aussi connues sous le nom de manhwa – publiées directement en ligne (webcomics) semblent avoir trouve un certain essor. Les principaux hébergeurs ont lancé des sections dédiées, notamment Naver et Daum. Killer Toon est le premier film à les exploiter au coeur de son intrigue, alors que jusqu’à maintenant il s’agissait surtout d’adaptations au cinéma de manhwa populaires.

Réalise par Kim Yong-kyun, connu pour sa dextérité à créer des scènes visuellement irrésistibles – que ce soit dans un genre similaire, avec The Red Shoes, marquant pour son ton ténébreux et gore, ou tout autre, avec The Sword with No Name. À cet effet, Killer Toon a le réalisateur adapté pour faire honneur aux manhwa et c’est effectivement le plus séduisant dans ce film – la beauté et légereté avec laquelle les scènes fictionnelles transitionnent vers la réalité des événements et vice-versa.

S’appuyant sur ces transitions, Kim joue beaucoup sur les moments d’incertitude entre ce qui est dessiné et ce qui se passe – notamment avec les angles morts. De ce point de vue, le film est très réussi à créer une tension permanente qui le classifierait d’ailleurs d’abord dans la catégorie des thrillers. Les dessins sont d’une grande beauté, sombre, gothique, et terrifiant – rendant le film très agréable a regardé: en dehors de l’artiste de l’histoire, la dessinatrice Ji-yoon (joué par la charmante Lee Si-young), le véritable artiste a l’oeuvre est Kim Yong-kyun.

Il ne faut pas oublier que Killer Toon rentre aussi dans la catégorie horreur, comme trois autres films coréens sortis pendant l’été 2013. Le premier à ouvrir la saison estivale, il s’est d’ailleurs imposé parmi les films du genre, et a d’ailleurs été le premier film d’horreur a vendre plus d’un million de tickets de cinéma depuis Death Bell en 2008. Bien que les scènes terrifiantes soient peu nombreuses, et parfois trop courtes (on souhaiterait en avoir plus!), elles font tout de même bien sursauter. Souvent elles sont cependant assez clichées, comme la main monstrueuse derrière l’épaule, l’extinction suspecte des lampes, ou encore le jeu d’apparition-disparition des fantômes plus près.

Comme les scènes d’horreurs, les occasions de voir les acteurs developper leur jeu sont rares. Les scènes de lutte sont nombreuses sans pour autant beaucoup de résistance. Les personnalités des personnages changent même de façon très radicale entre le début et la fin, telle Ji-youn passant de la dessinatrice étourdie et victime a la star avide de reconnaissance dans son art. Pour autant, leurs rôles tiennent la route et chacun réussit à rendre des performances convaincantes dans le peu de marge qui leur est laissée. Mais, il faut avouer que, du fait que le film soit plus du cote thriller qu’horreur, les situations de jeu sont très diverses et plus riches que le film d’horreur classique. Donc, au lieu de s’enfermer sur le genre horreur avec sa base de fans spécifique, le film reste ouvert vers un public cherchant un bon thriller voire d’évasion esthétique.

La révélation finale quant à elle semble un peu « cheveu sur la soupe » et n’apparaît pas de façon si évidente – du fait de la caractérisation précédente des personnages. Mais, elle fait tout de même sens et apporte une résolution plutôt claire et simple. De même, l’opposition rapidement dépassée entre des détectives cherchant à classer les crimes comme des suicides contribue a un scénario qui n’est pas si compliqué qu’intentionnellement. Du coup, le film reste plutôt du côté divertissant que du puzzle mental. La morale est relativement superficielle, et n’apporte pas grand-chose (“chacun a un côté sombre que nous essayons de cacher, mais qui resurgit tôt ou tard), mais reste de bonne intention et contribue positivement à apporter le dénouement du film. Un rapprochement intéressant peut-être fait avec Death Note qui de façon similaire montrait que jouer avec la vie des gens pouvait être a double tranchant et à prendre au sérieux.

En bref, malgré des manques du côté de l’horreur et quelques enchaînements logiques, Killer Toon s’avère un film d’horreur visuellement magnifique, de ce fait très immersif, et qui explore un thème extrêmement intéressant et tout à fait unique. Touchant a plusieurs dimensions, ce n’est pas purement un film d’horreur, malgré certaines scènes effrayantes, mais peut tout à fait séduire une diversité de publics.