Critique : Confession of murder de Byeong-Gil Jeong

Confession of murder de Byeong-Gil Jeong
Note des lecteurs16 Notes
4

Confession of murder est un thriller sud-coréen de 2012, premier film de Byeong-Gil Jeong.

Début des années 90. Une course poursuite entre un tueur en série et l’inspecteur Choi vire au désastre. Le tueur arrive à fuir en humiliant le policier, lui laissant au passage une balafre au visage et la promesse de se revoir un jour. Quinze années passent, les meurtres du tueur en série sont prescrits, quand un homme sort un livre de confessions avouant qu’il est le coupable. L’inspecteur Choi assiste, impuissant, au spectacle médiatique de cet homme étrange, qui dit vouloir faire acte de repentance. Pourtant Choi a un doute, est-t-il vraiment le tueur en série ou s’agit-il d’un manipulateur ?…

L’édition 2013 de l’Étrange Festival au Forum des Images nous permet de découvrir une série de thrillers tout droit venus d’un pays aujourd’hui maître du genre : la Corée du sud. Ici, le film qui nous a été proposé est celui d’un jeune metteur en scène : Byeong-Gil Jeong.

Confession of murder s’inscrit dans la lignée de ses grands frères The Chaser, Sympathie for Mr Vengeance, tout en assumant un côté action grand spectacle avec des séquences surprenantes. Car oui, Confession of murder est assez frénétique. Mais abordons d’abord l’histoire qui réserve son lot de surprises. Le point de départ est des plus originaux : un meurtrier qui devient littéralement une « star » en publiant un livre, une fois ses crimes prescrits. Le film interroge le rapport à la célébrité dans nos sociétés modernes, et n’est pas si fantasmatique que ça, j’en veux pour preuve le cas de Sagawa. Cet étudiant japonais qui avait tué et dévoré une camarade de classe en France au début des années 80, a connu, une fois libéré, la célébrité dans son pays, écrivant des livres sur son crime, et apparaissant à la télévision et dans des publicités pour des restaurants de viande… Il est fort probable que Confession of Murder s’inspire de ce fait divers et de ce personnage dérangeant, mais en y ajoutant une dimension liée à la représentation et à l’image qui est tout à fait contemporaine. Dans le film, l’auteur qui avoue être le tueur en série a une parfaite « gueule d’ange », ressemblant à une star de K-pop. Il a des fans féminines qui le trouvent beau à se pâmer, et seraient déçues qu’il ne soit pas réellement le tueur (la star)… Cette description de la société coréenne (et mondiale) moderne est terrifiante, démontrant le diktat de l’image et de la célébrité. En outre le dispositif scénaristique est très intéressant car dans cette histoire de meurtrier, nous découvrons le ‘possible’ coupable dans les dix premières minutes, quand le système judiciaire et policier ne peuvent plus rien entreprendre contre lui. Il faut même le protéger des familles de victimes qui veulent se venger. Ce retournement de situation se révèle diablement efficace et met le spectateur dans une situation de malaise, renvoyant chacun à sa propre morale, comme pouvait le faire Lady of Vengeance.

Côté mise en scène, dès la scène d’introduction : une course poursuite sous une pluie diluvienne, entre le tueur et le policier ; le réalisateur travaille le rythme de son ouverture pour percuter le spectateur tout en réussissant à créer une séquence lisible et inventive. On est placé du point de vue du poursuivant, les gouttes d’eau sont visibles sur l’objectif, la caméra portée virevolte, passe sous une voiture. Le tueur saute d’un toit, la caméra saute de même, Byeong-Gil Jeong place le spectateur au cœur de son dispositif, cette première scène est une totale réussite d’action et de tension, et augure d’un grand thriller d’action. Pourtant par la suite, d’autres scènes iront dans la surenchère donnant l’impression, parfois, de sortir du thriller pour la comédie cartoonesque. L’intention de Byeong-Gil Jeong est-elle de casser les codes dans ces scènes ? En tout cas, elles déroutent, surtout que certains effets sont visibles, et que toutes les incrustations ne font pas honneur au film. Mais hormis ces quelques écarts, la mise en scène vraiment maîtrisée laisse présager le meilleur pour ce jeune metteur en scène.

Confession of murder nous propose avant tout un scénario diablement intelligent et dérangeant, mais aussi une mise en scène maîtrisée, qui en font un thriller que l’on n’est pas prêt d’oublier. Byeong-Gil Jeong pose assurément ses pas dans ceux de Kim Jee Woon et Park Chan Wook.